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Off Avignon 2021. Nicolas Bacchus, Manu Lods, Lily Luca, chansons sur, pour, contre, par les amis
L’arrache-Cœur, 9 juillet 2021
On connaît Nicolas Bacchus, sa liberté d’écriture et de pensée, ses satires provocatrices, son mélange de tragédie et de libertinage, sa voix puissante et son goût pour les collaborations d’artiste. D’Anne Sylvestre à Agnès Bihl, de Patrick Font à Sarcloret, et depuis son installation à Lyon, avec la crème des artistes de la capitale des Gaules, et bien d’autres, il a tissé des liens, créé des spectacles, distribué des artistes autoproduits et indépendants avec son label éclectique Bacchanales Productions.
Récemment le projet C’est un joli nom camarade réunissait autour de Tomas Pitiot une éblouissante distribution pour rendre un hommage personnalisé et respectueux au chanteur d’Antraigues, qui a donné lieu à un album distribué aux Bacchanales.
En cette période difficile il a tenté de rendre audibles les artistes privés de paroles, initiant un des premiers concerts en streaming enregistré dans de bonnes conditions, dans la salle lyonnaise intimiste A Thou Bout d’Chant. sur une idée de deux membres de l’équipe NosEnchanteurs, Anne-Marie Panigada et Babette Richard. En mai 2020 avec Frédéric Bobin et Evelyne Gallet, puis en juin AnneLise Roche et Gérard Morel. En février 2021 on l’y a même entendu chanter Dassin avec Garance, Lily Luca et Karine Zarka lors du bel hommage collectif qui lui fut rendu (à 1:02:35 en belle harmonie chorale).
Pour ce retour au Off d’Avignon quelque peu aminci par les contraintes sanitaires, il a donc eu l’idée d’une sorte de Cabaret où il inviterait ses ami.e.s chantistes privés de spectacles depuis plus d’un an, à raison d’un ou deux par concert, tous les jours sauf les lundis, en les faisant venir et revenir, leur permettant ainsi de présenter leurs derniers albums, souvent sortis récemment, en solo à la guitare. C’est Garance Bauhain qui en est la chargée de production.
Quelques nouvelles chansons pour nous mettre en train, une belle confession de Nicolas, écrite sur mesure par son complice de toujours Manu Galure : « J’ai tout commencé tard / J’ai chanté bien trop tard / Pour qu’on me trouve du talent ». Pas d’accord, tôt ou tard, Bacchus a du talent, et son interprétation douce et pleine d’émotion dévoile aussi ses qualités de comédien.
Lui qui chanta à ses (beaux) débuts La chanson de l’ami, en réalité une chanson d’amour, sensuelle et poignante, reprend cette fois La chanson sur l’ami de Vissotski – artiste qu’il a déjà excellé à interpréter avec La fin du bal – pour exorciser une faille d’amitié qui lui reste en travers de la gorge. Ça ne lui a coupé ni la voix, qui soutient la comparaison avec le barde russe, ni l’envie de réunir ses amis artistes. « Si tu veux savoir si l’ami est celui qu’il prétend, vraiment (…) Les montagnes sont là pour ça vers les cimes avec lui, vas-y / Dans la même cordée, liés tu sauras qui il est ».
Pour ne pas perdre les bonnes habitudes, c’est avec la promesse d’un langage châtié digne de Molière, jouant de la guitare comme un luth, qu’il nous dédie ce titre noblement écrit pour Les Chanteurs français, invités les 15 et 16 juillet, chanson à double-sens « D’être pénétré par la langue / Je ne peux que me réjouir / Quand la verve agite mes lèvres / Je me sens tres-saillir » . Enfin, une mise en musique d’un sonnet de Brecht, veine méconnue et poétique de l’artiste, où l’amour et le désir triomphent de la guerre.
Lily Luca Photo d’archives ©Nicolas Blanchard
Avant d’appeler impromptu une invitée surprise, assise à côté de moi dans le public… la toujours Open Lily Luca.
Lily sort d’une tournée en vélo en juin (sans assistance électrique), en short et en tongs. C’est une fille qui assure, toujours présente, open dit-on maintenant, même si cette chanson milite sans le dire pour l’autonomie des femmes… C’est Nicolas qui se charge des chœurs sur Laissez-moi peigner mon poney, plaidoyer délicat pour les libres choix de vie quel que soit le genre. Lily revient en invitée officielle les 24, 25, 29 et 30 juillet. On peut l’écouter tous les soirs à 21h20 à La Maison de la Parole (sauf les mardis).
Manu Lods Photo d’archives © Babette Richard
Place à l’invité vedette de cet après-midi, Manu Lods, qui vient nous présenter son album tout nouveau, « Hotel de l’Atlantique », avec sa légendaire et élégante casquette claire et sa marinière, qui s’impose d’autant plus, voix douce et complice. Longtemps en compagnie de Font et Val, Renaud, Toulis, Têtes raides, … Manu écrit depuis la fin des années 80, avec tous les talents d’un nouvelliste. Il fait partie de la famille, entre tendresse et causticité. Son expérience de père l’autorise à écrire cette hilarante TKT, adressée à sa fille « Sans compter les fous les pervers, tu vas t’faire emmerder / Mince à la fin, écoute ton père, arrête de m’textoter – TKT, TKT, Papa faut pas t’inquiéter ». Suivi de l’indispensable « Je gère ».
Joli hommage aussi à cette belle Odette peu flattée par ses parents, qui eut bien mérité de s’appeler Héloïse, Aliénor ou Isis… « Tu mériterais pourtant ma belle / De porter le nom d’une chanson éternelle : Barbara, Madeleine (..) Laetitia (…) Aline … Tu n’avais pas de chanson / Aujourd’hui c’est chose faite / Celle-ci est pour toi, Odette ». Je recommande ce poétique inventaire à tous les futurs parents d’une petite fille, en manque d’inspiration, le plus dur sera de choisir.
Plein d’inventivité, ses chansons sont de petits films capables de nous faire remonter des souvenirs. Ceux de cette belle inatteignable, jupe blanche virevoltante et escarpins rouges, premier émois de vacances À la pointe des Galets. Ceux de cette Mamie en 68, peace and love et plus si affinités, à qui on demande raison de photos bien étonnantes, d’une époque de libertés difficiles à concevoir maintenant. Quant aux technologies modernes, elles sont capables de lui inspirer cette Mademoiselle GPS qui tangote avec lui vers un impossible rendez-vous.
Tant de souvenirs ne pouvait que nous replonger dans les années 90 avec Claire d’Angleterre, l’inoubliable jeune fille au pair qui lui a appris plus que l’anglais. Et avec Bacchus, Les femmes de nos potes, mise en musique par Vals du temps où il était chanteur, dans la veine humoristique mais toujours tendre, et l’irrésistible On s’en branle du duo Font & Val.
Le rappel final réunira nos trois acolytes dans une chanson à rimes grivoises attendues éclipsées, Pénélope, dans la tradition des cabarets des XIXeme et XXeme siècle : « Ils sont nombreux, ils sont beaucoup / ceux qui voudraient tirer… un trait / Sur notre amour ».
Un cabaret drôle, émouvant, varié, où on peut, et même c’est conseillé, retourner plusieurs fois. Comme c’est sur les amis, par les amis, contre les amis, pour les amis, Nicolas vous fait un prix d’ami…
Après Oscar les vacances, Garance les 10 et 11, puis Sarclo, Frédéric Bobin et Hélène Piris, les mardi 13 et mercredi 15, rendez-vous à nouveau avec Hélène Piris jeudi 15 avec Les chanteurs français, qui reviennent le 16. Programme détaillé sur l’affiche pour la suite.
Arrache ta chanson, L’Arrache-Cœur, 13, rue du 50eme régiment d’infanterie 09 85 09 97 42, jusqu’au 31 juillet 2021 à 17h sauf les lundis.
Le site de Nicolas Bacchus c’est ici. Celui de Lily Luca, là. Celui de Manu Lods, ici. Ce que NosEnchanteurs a déjà dit de Nicolas Bacchus, ici. De Lily Luca, là. De Manu Lods, ici.